Communication non violente

Communication non violente (Formation permanente)

- Marshall Rosenberg "Les mots sont des fenêtres (ou bien ce sont des murs)
- Thomas d'Ansembourg
- David Servan-Schreiber
- Jacques Salomé
- Les 4 accords toltèques
- Faber et Mazlish

La communication non violente (CNV) est un processus de communication élaboré par Marshall B. Rosenberg. Selon son auteur, ce sont « le langage et les interactions qui renforcent notre aptitude à donner avec bienveillance et à inspirer aux autres le désir d'en faire autant »
L'empathie est au cœur de la CNV,  c'est une « communication consciente » dont les caractéristiques principales sont l'empathie, l'authenticité et la responsabilité.

    « La Communication Non Violente, c'est la combinaison d'un langage, d'une façon de penser, d'un savoir-faire en communication et de moyens d'influence qui servent mon désir de faire trois choses :
    - me libérer du conditionnement culturel qui est en discordance avec la manière dont je veux vivre ma vie
    - acquérir le pouvoir de me mettre en lien avec moi-même et autrui d'une façon qui me permette de donner               naturellement à partir de mon cœur
    - acquérir le pouvoir de créer des structures qui soutiennent cette façon de donner. »

Selon Thomas d'Ansembourg, le processus de la CNV vise à aider à éclaircir ce que nous vivons. Il ne s'agit pas de l'empathie en tant que telle, mais elle y donne accès. Il ne s'agit pas non plus d'une simple écoute, mais de « se relier efficacement à soi et à l'autre », c'est-à-dire prendre pleinement conscience de ses propres sentiments et de ceux de l'autre.

Dans son best-seller Guérir, David Servan-Schreiber décrit le processus de la CNV en termes relativement simples. Selon lui, le premier principe de la CNV est de remplacer tout jugement par une observation objective, afin d'éviter les réactions habituelles de son interlocuteur face à une critique. Le second principe est d'éviter tout jugement sur son interlocuteur pour ne parler que de ce que l'on ressent, l'autre ne pouvant contester cela. L'effort consiste alors à décrire la situation en commençant ses phrases par « je », pour être « dans l'authenticité et l'ouverture ».

Pour Marshall Rosenberg, le but de la CNV est de « favoriser l'élan du cœur et nous relier à nous-mêmes et aux autres, laissant libre cours à notre bienveillance naturelle. ». Il appelle cela la Communication Non Violente en référence à Gandhi, au sens d'une communication où il ne reste plus trace de violence.

Le processus de Communication Non Violente peut être utilisé de trois manières :

- communiquer avec soi-même pour clarifier ce qui se passe en soi (auto-empathie) ;
- communiquer vers l'autre d'une manière qui favorise la compréhension et l'acceptation du message (expression authentique);
- recevoir un message de l'autre, l'écouter d'une manière qui favorise le dialogue quelle que soit sa manière de s'exprimer (empathie).

Pour que ce processus favorise réellement la coopération et le dialogue, cela suppose :

    une attention au moment présent ;
    une intention claire de favoriser le dialogue et la coopération.

Les quatre étapes de la CNV
Les 4 étapes du processus de la CNV, dans l'expression et dans l'écoute.

Qu'il s'agisse de clarifier ce qui se passe en soi ou de communiquer avec d'autres, la méthode de la CNV peut être résumée comme un cheminement en quatre temps :

Observation (O) : décrire la situation en termes d'observation partageable ;
Sentiment et attitudes (S) : exprimer les sentiments et attitudes suscités dans cette situation ;
Besoin (B) : clarifier le(s) besoin(s) ;
Demande (D) : faire une demande respectant les critères suivants : réalisable, concrète, précise et formulée positivement.

Si cela est possible, que l'action soit faisable dans l'instant présent. Le fait que la demande soit accompagnée d'une formulation des besoins la rend négociable.

Cependant, il ne s'agit pas d'une manière de parler qu'il faudrait suivre à tout prix. Les concepts proposés sont des repères, destinés à faciliter l'expression de la bienveillance, et non pas des règles à suivre. On remarquera alors par exemple si nos besoins ne sont pas clairs pour notre interlocuteur, ou si au contraire, les besoins de notre interlocuteur ne nous apparaissent pas clairement.

Dans une situation de communication, l'ordre de présentation des étapes est indifférent : on peut très bien commencer par exprimer ses sentiments (S), générés par une situation (O), puis parler de ses besoins (B) pour présenter une demande (D). L'important est de présenter toutes les étapes.

Observer les faits

Quand nous décrivons une situation, nous exprimons différentes choses :

    - des observations objectives (ce qu'on a vu, ce qu'on peut logiquement en déduire sans faire d'hypothèse particulière)
    - des évaluations (penser en termes de bien ou de mal, qualifier la personne ou la situation etc.)
    - des interprétations (faire des conclusions qui se basent sur des présupposés)

Du point de vue de la CNV, les évaluations et les interprétations sont légitimes et peuvent être exprimées. L'important est de les distinguer des observations objectives et de préciser que c'est ce que nous imaginons.

Il recommande d'éviter d'utiliser des évaluations et des jugements, parce que si notre interlocuteur se sent jugé, il aura tendance à s'investir dans l'autodéfense plutôt que la compréhension. Par ailleurs, les évaluations rendent le monde statique, alors qu'il est en transformation constante. Comme l'explique Wendell Johnson, le langage est un instrument imparfait invitant à parler de stabilité et de normalité, alors que la réalité est changeante et faite de différences. La CNV recommande de parler de faits concrets pour décrire les événements plutôt que d'attribuer des caractéristiques définitives à l'interlocuteur ou au monde ce qui l'enferme mentalement dans une case. Alors qu'en parlant de faits concrets, on ouvre la possibilité de formuler des demandes d'actions précises à réaliser dans le futur.

Ex. : « Tu es un fainéant » (jugement) s'oppose à « Cela fait une semaine que tu n'es pas sorti » (fait observable).

Obstacle à l'expression des observations : ne pas avoir vraiment l'intention de communiquer, mais être dans un rapport de pouvoir ou de compétition.

Exprimer ses sentiments, ses émotions et ses attitudes

Par exemple : avoir peur, être curieux, être surpris, être triste, être plein d'énergie, etc. Afin de pouvoir communiquer ce qui se passe en nous, la CNV nous invite à développer un vocabulaire affectif pour exprimer toute la palette d'émotions qui peuvent nous toucher.

Un des pièges habituels dans l'interprétation des sentiments est de faire l'amalgame entre les émotions et la perception que l'on se fait de l'autre, de ses agissements et de ce qu'on imagine faire. Par exemple, si l'on dit à quelqu'un qu'on se sent ignoré par lui parce qu'il ne nous a pas dit bonjour, on ne décrit pas nos sentiments mais notre interprétation de son comportement. Nos sentiments peuvent ici être de la tristesse ou de la frustration.

De même, certaines expressions cultivent la confusion entre sentiment et jugement. Par exemple, « j'ai le sentiment que tu ne m'aimes pas » n'est pas un sentiment mais un jugement : on interprète le comportement de l'autre.

De manière générale, à chaque fois qu'intervient le mot « tu » dans une phrase (« vous », « les autres »…), la probabilité est très forte qu'il s'agisse d'un jugement et non d'un sentiment.

Obstacle à l'expression de sentiments et attitudes voire peur de communiquer sur ce que l'on considère comme intime par pudeur, par peur du regard des autres, etc.

Exprimer les besoins

Quand nous ne sommes pas conscients du lien entre nos besoins et nos sentiments, nous croyons que ce sont les situations qui, seules, provoquent ce que nous ressentons et nos attitudes. Entre les actions des autres et nos sentiments, il y a nos besoins qui sont un élément de causalité intermédiaire. D'où l'importance de déterminer les besoins et de les assumer. Par ailleurs, si l'on accompagne nos demandes de l'explication des raisons profondes, on permet à l'autre de nous comprendre et, si jamais il ne peut accepter ce que nous demandons, il proposera plus spontanément une alternative permettant de satisfaire à la fois le porteur de la demande et lui-même.

Pour la CNV, les besoins sont les mêmes pour tous, mais leur expression diffère selon les personnes, les époques, les cultures.

Obstacles à l'expression des besoins :

    Le conditionnement social ou familial qui réprime l'expression des sentiments
    Un manque d'habitude à exprimer ses besoins
    Le manque de vocabulaire pour exprimer ses sentiments et ses besoins (je vais « bien », je vais « mal »)
    Croire qu'on se met en situation de faiblesse (risque d'être critiqué ou manipulé)
    Ne pas croire que l'autre puisse faire preuve de bienveillance à l'égard de nos besoins

Demander les actions que l'on souhaite

La CNV nous invite à traduire nos besoins généraux en demandes concrètes, c'est-à-dire concernant des actions précises nécessaires pour satisfaire les besoins les plus urgents, ou bien de prévoir des actions possibles afin de répondre à un problème qui pourrait se (re)produire dans le futur. Selon les principes de la CNV, il n'est pas nécessaire d'utiliser les exigences, la menace, les ordres ou la manipulation. De telles méthodes sont même considérées comme entraînant des conséquences négatives, par exemple de la peur ou de la frustration, et ne suscitent pas la bienveillance chez notre interlocuteur.

Pour M. Rosenberg, une demande a toutes les chances d'être entendue quand elle est :

- active et positive : demander ce que l'on veut, et non pas ce que l'on ne veut pas, exprimée dans un langage incitant à l'action.
- consciente et explicite : les demandes implicites sont sources de mauvaise interprétation et de désarroi pour ceux à qui elles s'adressent.
- simple, claire et précise : le but de la demande est clair pour tous et sa réalisation est à la portée de l'interlocuteur.

Rosenberg distingue « demande » et « exigence ». Il constate que les demandes sont fréquemment perçues comme des exigences, actes de domination auquel on répond soit par la soumission soit par la révolte. Il insiste donc sur la différence entre les deux.

On peut les distinguer par leur forme ou leur contenu. Les demandes exprimées sur un mode autoritaire ou contenant des termes qui expriment l'obligation (« il faut », « on doit », « c'est comme ça », verbe à l'impératif, etc.) sont des exigences.

Parfois leur expression est identique : « Veux-tu aller faire les courses ? » sera une demande ou une exigence, selon le contexte. On les distingue alors par l'attitude du demandeur face à un refus.

Si le refus génère chez lui un sentiment négatif (peur, colère, frustration, tristesse), sa demande était une exigence. Le sentiment négatif va alimenter une communication où jugements et critiques vont tenir une grande place, mettant en danger la relation. Le demandeur porte souvent ses critiques sur la personne à l'origine du refus (« tu dis toujours non », etc.) mais peut aussi se les adresser à lui-même (« quel imbécile d'avoir demandé ça ! »).

Si au contraire le demandeur reste serein face au refus et manifeste de l'empathie envers les besoins de son interlocuteur, il garde la communication ouverte. Il s'agit bien d'une demande, au sens de la CNV. Ce que Rosenberg exprime ainsi : « Dès lors que nous sommes prêts à écouter pleinement ce qui empêche l'autre de faire ce que nous lui demandons, nous formulons une demande, selon ma définition, et non une exigence. »

Pratique de la CNV

Conceptuellement, la méthode est simple : appliquer la démarche « OSBD » (Observation - Sentiment - Besoin - Demande), distinguer les faits des opinions, être clair avec soi-même et attentif à l'autre. Elle est cependant difficile à mettre en œuvre dans de nombreux cas. Marshall Rosenberg identifie des freins de langage — quand celui-ci utilise beaucoup de termes péremptoires — et culturels, quand le milieu privilégie les rapports de force sur les relations de collaboration.

Pour illustrer l'application de la démarche CNV, Marshall Rosenberg utilise la métaphore de la girafe et du chacal. La girafe représente la personne en situation de communication non violente, le chacal symbolise la violence présente dans les situations de communication. Ainsi l'apprentissage de la CNV consiste à passer d'une communication « chacal » à une communication « girafe ». Il n'y a pas de jugement de valeur dans le choix de ces animaux. Marshall Rosenberg a choisi la girafe car c'est l'animal terrestre avec le plus gros cœur et parce qu'elle a très peu d'ennemis naturels. En aucun cas il ne s'agit d'une référence à une gentillesse supposée. Comme il le dit lui-même : « les girafes ne sont pas gentilles ».
En CNV, l'autre reste toujours libre et son réel consentement est essentiel. Le pratiquant de la CNV, tel que le conçoit M. Rosenberg, préférera accueillir un refus qu'une acceptation forcée. La personne qui emploie la CNV recherche la satisfaction des besoins de lui-même et de l'autre, à égale mesure.
Enfin, son intention étant de permettre de répondre à ses besoins et à ceux de l'autre, la CNV invite à être souple et créatif sur les manières de répondre à ses besoins. Pour cela, la personne qui emploie la CNV doit être prête à changer de « stratégie de satisfaction de ses besoins », afin de prendre également en compte les besoins de l'autre.

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